Dramaturgie de la guerre
Problématique : Si le chapitre 2 nous convie bien à une première entrée réelle dans la guerre, – le chapitre précédent figurant plutôt une sorte de prologue –, à travers une mise en récit expressive et dramatique, telle que peut le figurer la notion de dramaturgie, ne peut-on percevoir un paradoxe à l’œuvre ici puisque c’est davantage d’une interminable attente qu’il s’agira que d’opérations militaires à proprement parler ? La dramaturgie narrative ne comporte-t-elle pas alors d’autres enjeux que la seule mise en lumière d’hommes et d’actions militaires ?
I – Dans ce chapitre, Barbusse dévoile en effet le théâtre des opérations, c’est-à-dire le cadre dans lequel prend place la guerre et évoluent des personnages que nous découvrons prisonniers d’une forme de fatalité
1 – Nous entrons ainsi in medias res, au cœur d’une sorte de scène d’exposition qui définit à la fois un cadre spatio-temporel et une galerie de personnages variés, au coeur d’une nature suppliciée, d’un déluge d’eau, de boue, de saleté et d’odeur insoutenable, dans le manque de tout, dans la privation du nécessaire le plus vital.
2 – Ces « damnés de la terre », « vétérans usagés » ou « troglodytes sinistres » tels que les décrit le narrateur, offrent alors la vision d’un groupe traversé de profondes différences, entre gros mots et « cris d’humanité ». Pourtant chacun se sent semblable à l’autre, « hommes » d’abord, tout simplement, et non « soldats », objets d’une « contagion fatale ».
3 – Car ce « Grand Drame » ainsi joué au fond des tranchées fait de ces hommes les victimes d’une fatalité qui leur échappe : « destinée aveugle » offerte à « l’âme obscure et ignorante de la multitude qui est là, ensevelie », des êtres « attachés ensemble par un destin irrémédiable », et non par la grandeur du Destin antique. Les dieux et leur épopée ont déserté ce monde des hommes, voués seulement à la peur, à la