Sartre, l'imaginaire, perception, imagination, conscience.
Il arrive parfois, au cours d’une conversation, que l’on évoque un évènement passé, en croyant l’avoir vécu, lorsqu’un doute s’empare de nous. Et si nous l’avions imaginé ? La véracité de cette situation n’a plus rien de certain. Aucun moyen ne permet de la vérifier, mais il est néanmoins sûr que l’évènement ait été perçu ou imaginé ; on a conscience de l’avoir ‘vécu’ d’une manière ou d’une autre. Le passé peut donc avoir l’effet d’un brouilleur de pistes en ce qui concerne un objet ou un évènement vécu ou imaginé, à la façon de la buée sur une vitre. Mais dans le présent, cette différence est indubitable ; et c’est là-dessus que s’interroge Jean-Paul Sartre, grand écrivain français et philosophe existentialiste du début de XXème siècle, dans cet extrait de l’Imaginaire. Il argumente ici pour montrer que la conscience se rapporte à la fois à la perception et à l’imagination, qui sont deux notions différentes, mais ce, de manière divergente. C’est pourquoi, après nous être livrés à un examen méthodique de l’argumentation de Jean-Paul Sartre, nous tenterons d’en proposer une vision plus critique.
Dans un premier temps (l. 1 à 5), l’auteur sépare nettement la chaise sur laquelle il est assis, de la perception et de l’imagination dont elle est l’objet. Par la suite (l. 5 à 9) il affirme que l’objet de la perception et de l’imagination peut être identique, mais (l. 9 à 13) qu’il reste néanmoins toujours extérieur à la conscience, et c’est là sa thèse. Enfin (l. 13 à 17) il dit que, même si l’objet perçu ou imaginé est le même, la conscience s’y rapporte de manière différente. Dès la première phrase, Sartre dénonce ce qu’il considère comme incohérent: « Il serait absurde de dire que la chaise est dans ma perception » ; au sens où, selon lui, la perception et le fait de sentir la chaise et non la chaise