Lettre bardamu
Ma chère Eléonore,
Cela fait plus de deux mois que je ne vous écrivais plus par manque de temps.
Là-bas, dans les champs de ruines, la guerre faisait toujours rage et s’amplifiait de jour en jour devenant plus horrible et atroce.
Je vivais une grande apocalypse qu’est la guerre, autant une guerre des tranchées qu’une guerre des mines.
Personne ne m’avait prévenu de cette abomination !
Aucuns de mes proches, aucunes personnes de mon entourage n’auraient pu me prévenir ?
Les conditions dans lesquelles je vivais étaient désastreuses, croyez- moi !
Dans les tranchées, la pluie faisait glisser la terre en une boue épaisse et glaciale ; cette glaise, je ne pouvais plus m’en défaire. J’étais trempé jusqu’aux os, cela atteignait le peu de moral qui me restait. De plus, la faim me gagnait, je n’avais déjà pas grand-chose. La viande arrivait froide et tard dans la nuit, mais il fallait déjà repartir aux fronts ainsi je ne mangeais que du pain sec. Comprenez vous, nous n’avions plus aucunes provisions, plus aucunes réserves.
Cette croisade se résumait en des assauts multiples contre les lignes adverses, qui se soldaient par d’infâmes boucheries absolument inutiles. Les ordres des généraux étaient : « Marchez, Avancez, Tirez, Courez toujours tout droit », et moi, je comprenais : « Marchez, avancez, courez, toujours tout droit, vers votre mort » !
Le plus difficile, c’était que je devais respecter ces marioles alors qu’ils nous tuaient en nous envoyant aux fronts !
Pendant ces affreux moments c’était plus par obligation que par nécessité que je tirais sur les Prussiens.
Je réprouvais ces meurtres collectifs, je les considérais comme d’horribles assassinats et haïssais tous ceux qui en étaient à l’origine, tous ceux qui les avaient voulus et provoqués. Les combats incessants étaient de véritables enfers. Jours comme nuits, le bruit m’ habitait ; les Prussiens avaient un armement plus redoutable que le notre ainsi ils nous tenaient en échec.