Camus
L’auteur, qui a beaucoup de sympathie pour lui et qui lui a prêté bon nombre de ses propres idées, voire de ses expériences personnelles, nous raconte son histoire (c'est le seul personnage dont nous connaissions aussi bien le passé). Fils d'un avocat général, il a vécu dans l'idée de son innocence, jusqu'au jour où, âgé de 17 ans, il est allé voir son père requérir la peine capitale, qui n'est rien d'autre que le plus abject des assassinats. II a quitté le domicile paternel, a fait de la politique, a lutté dans tous les pays d'Europe pour instituer une société plus juste : hélas! dans les rangs où il combattait, on procédait à des condamnations nécessaires. Après avoir vu fusiller un homme en Hongrie et découvert que nous étions tous des pestiférés (découverte fort antérieure à la peste d'Oran), il a refusé, avec un aveuglement obstiné, tout ce qui fait mourir. Au lieu d'être un meurtrier raisonnable, il a voulu n'être plus qu'un meurtrier innocent. Sa morale est devenue celle de la sympathie, de la compréhension. Morale réellement mise en pratique, puisqu'il comprend Cottard et Paneloux qui, chacun à sa façon, sont si différents de lui. Et il n'ignore pas l'amitié, comme le prouve le bain qu'il prend en compagnie du docteur Rieux.
Mais comprendre ne l'empêche pas de lutter au maximum et jusqu'au bout. Il est l'initiateur du plan d'organisation des formations sanitaires volontaires. Refusant d'être fataliste, il n'accepte pas de s'avouer vaincu avant que l'on ait tout essayé. Quand il sera atteint par la maladie, il résistera, dans la lucidité, mais de toutes ses forces. Pourtant ce saint laïque n'échappe pas à la mort. Pourquoi? Pour montrer que la peste (comme la guerre) frappe aveuglément, même parmi ceux qui ne méritent pas de mourir, pour montrer surtout que, mime lorsque le fléau est