L'art est-il etranger à la réalité?
Corrigé
Introduction
Depuis notre réveil ce matin, nous n'avons presque exclusivement rencontré que des produits de l'art humain : les maisons, les routes, mais aussi les arbres, qui ont été plantés et entretenus par l'homme, et les animaux obtenus par croisement. Si nous donnons à l'art son sens le plus large, en l'opposant à la nature (la nature étant ce qui se fait sans que l'homme y « prête la main »), alors force est de reconnaître qu'il n'y a rien de plus quotidien que les objets d'art : ce sont eux qui constituent notre monde. Mais parmi toutes ces créations du produire humain, nous en distinguons certaines, les œuvres d'art, nées du travail d'un artiste et non d'un artisan, et qui semblent trancher par rapport aux objets peuplant notre réalité quotidienne. Certes, je peux passer devant cette statue sans la regarder, parce que je la croise tous les matins ; mais alors, je ne m'y rapporte pas comme à une œuvre d'art. Quand j'y porte mon attention en revanche, quand je la regarde comme statue et non comme décor habituel et indifférent, est-ce que je me rapporte à elle comme à n'importe quel objet ? En d'autres termes, l'art est-il étranger à la réalité quotidienne ? Dire que l'œuvre d'art surgit comme une étrangeté dépaysante, c'est admettre qu'elle n'a pas pour nous la même modalité de présence que les objets d'usage qui constituent le monde humain. Alors, comment nous rapportons-nous aux œuvres d'art, et ce rapport diffère-t-il de la façon dont nous sommes en relation avec les autres objets fabriqués par l'homme ? Et si cette différence devait être constatée, faudrait-il l'expliquer par une hétérogénéité dans les modes de production de l'objet d'usage d'une part et de l'objet d'art d'autre part ?
La question est d'autant plus délicate que la distinction de l'artiste et de l'artisan est en fait assez récente et que nous qualifions d'œuvres d'art des productions elles-mêmes sans commune mesure : quel