L' habitus
Par le concept d’habitus, Bourdieu vise à penser le lien entre socialisation et actions des individus. L’habitus est constitué en effet par l’ensemble des dispositions, schèmes d’action ou de perception que l’individu acquiert à travers son expérience sociale. Par sa socialisation, puis par sa trajectoire sociale, tout individu incorpore lentement un ensemble de manières de penser, sentir et agir, qui se révèlent durables. Bourdieu pense que ces dispositions sont à l’origine des pratiques futures des individus.
Toutefois, l’habitus est plus qu’un simple conditionnement qui conduirait à reproduire mécaniquement ce que l’on a acquis. L’habitus n’est pas une habitude que l’on accomplit machinalement. En effet, ces dispositions ressemblent davantage à la grammaire de sa langue maternelle. Grâce à cette grammaire acquise par socialisation, l’individu peut, de fait, fabriquer une infinité de phrases pour faire face à toutes les situations. Il ne répète pas inlassablement la même phrase, comme le ferait un perroquet. Les dispositions de l’habitus sont du même type : elles sont des schèmes de perception et d’action qui permettent à l’individu de produire un ensemble de pratiques nouvelles adaptées au monde social où il se trouve. L’habitus est « puissamment générateur : il est même à l’origine d’un sens pratique. Bourdieu définit ainsi l’habitus comme des « structures structurées prédisposées à fonctionner comme structures structurantes ». L’habitus est structure structurée puisqu’il est produit par socialisation ; mais il est également structure structurante car générateur d’une infinité de pratiques nouvelles.
Dans la mesure où ces dispositions font système, l’habitus est à l’origine de l’unité des pensées et actions de chaque individu. Mais, dans la mesure où les individus issus des mêmes groupes sociaux ont vécu des socialisations semblables, il explique aussi la similitude des manières de penser, sentir et agir propres aux individus d’une même classe