Travail collaboratif
Peut-on encore faire un état des lieux sur les technologies collaboratives ?
Depuis 20 ans, les réflexions sur ces technologies sont devenues l’objet d’une discipline scientifique à part entière : le Computer Supported Cooperative Work (travail coopératif assisté par ordinateur, CSCW). Depuis que ce terme a été forgé en 1984 par Irène Greif et Paul M. Cashman, des chercheurs d’origines disciplinaires extrêmement diverses (ergonomie, psychologie, linguistique, sociologie, etc.) se sont investis dans des recherches présentées dans de très nombreux colloques (dont le principal est le colloque bisannuel « CSCW » qui a donné naissance à un colloque « frère » en Europe dénommé « ECSCW »), dans une revue spécialisée (CSCW), dans des dizaines d’ouvrages et des centaines d’articles.
Depuis leur origine, on peut considérer que les technologies collaboratives sont une des innovations technologiques qui est le mieux parvenue à associer les sciences sociales à son développement. Alors que dans la plupart des domaines on constate une frontière étanche entre une sociologie des techniques qui analyse comment une technologie est produite et une sociologie des usages qui étudie les effets sociaux de ces mêmes technologies, on trouve avec les technologies collaboratives une configuration spécifique où sociologie des techniques et sociologie des usages dialoguent entre elles pour proposer de manière rapide et itérative des améliorations des logiciels conçus (Kies, Williges, Rosson, 1998).
Cette proximité entre les sciences sociales et la conception des technologies collaboratives a eu des conséquences sur la manière dont ces technologies sont conçues. En effet, pour toutes les personnes qui travaillent dans ce champ, il apparaît clairement que conception et usages ne sont pas deux moments qui se succèdent dans la vie d’une innovation technologique mais deux activités qui doivent s’interpénétrer afin de produire des