Souvenir d'un poilu
Le Nancéien Léon Guth est né dans une famille qui avait fui l'Alsace-Lorraine annexée.Il était un excellent élève de l'Ecole normale supérieure de Saint-Cloud. Il obtient son certificat en 1913 et sera mobilisé dès le début de la guerre au 26 ème régiment d'infanterie.
Sergent, Léon Guth sera tué dans la Meuse le 11 avril 1916. Il aura entretenu une importante correspondance avec son père pendant toute la durée de la guerre.
Le 16 septembre 1916:
« Cher Papa.
Merci pour le paquet que tu m'as envoyé et qui contenait les objets dont j'avais besoin. Nous sommes aux tranchées depuis plusieurs jours ; grâce au bon repos que nous avons eu, je ne ressens pas grande fatigue d'avoir repris cette vie spéciale où il faut beaucoup veiller et séjourner pendant de longues heures dans des trous où l'on se gène les uns les autres, où il faut se recroqueviller sur soi-même, ne pouvant ni se tenir debout, ni toujours s'allonger complètement. C'est une situation qui vous rend surtout impatients et irritables. Comme sergent je suis un peu favorisé quant à la place que je puis occuper. Les hommes ont la vie très dure ; la garde, les corvées, le travail de terrassement leur laissent peu d'heures de sommeil. J'échappe encore à ces besognes où je n'ai qu'un rôle de surveillance.
Nous avons appris à connaître dans ce coin une nouvelle série de moyens de destruction que ces messieurs les Boches emploient contre nous. Les obus, petits ou gros, sont assez rares, mais les bombes, les torpilles, les boîtes à mitraille (ces deux derniers surtout ont des effets très violents) tombent sans arrêt. Nous avons en moyenne un tué et deux blessés par jour à la compagnie. Outre cela, nous sommes toujours exposés à sauter, les Boches venant creuser des mines sous nos tranchées. A tout cela nous répondons surtout par le tir du 75 ; le génie français fait aussi des mines et des contre-mines. On lance aussi quelques bombes et torpilles,