Qu’est-ce que mourir ?
« Les sociétés de haute modernité ont en propre de soumettre cet imaginaire foisonnant de la mort et de l’après-mort à un radical désenchantement. C’est de la science désormais que l’on attend la réponse à la question : ‘Qu’est-ce que mourir ?’ »1.
Dès son introduction l’ouvrage pose un constat, celui du radical changement qui s’opère aujourd’hui dans le rapport des hommes à la mort. Autrefois, elle était un lieu, un espoir, un mystère, une crainte. Elle était tout ce que l’imaginaire humain en faisait, se déployant au-delà de la finitude de cet être qui se sait mortel. Aujourd’hui, même le mystère disparaît et la peur seule demeure. La mort est désenchantée :
Au-delà de l’aspect scientifique, la mort devient aussi une question juridique, administrative, économique. Et par là, elle perd de sa force, de son impact, de sa substance. Elle s’intègre dans le « plan » qui conduit nos comportements et nos désirs quotidiens : « Cette construction, cette démonstration de la mort, de plus en plus compliquée, annonce le règne de la justification, de la mise aux normes et en normes »2, souligne Bernard-Marie Dupont. Les différents aspects se mêlent alors pour créer dans nos sociétés une terrible incertitude : qu’est ce que la mort ? Toutes ces évolutions se cristallisent autour du médecin qui a pour fonction de déclarer le décès, d’établir la mort.
Dès lors que la conception de la mort change, les significations collectives qu’elle prend changent aussi. C’est l’émotion qui régit les nouvelles configurations de l’expérience de la mort par l’homme de la haute modernité, plus précisément l’individu et ce qu’il ressent. L’être au centre des sociétés dites individualistes devient aussi le centre des significations que pourra prendre le phénomène du mourir.
Face à un tel constat on serait tenter d’adopter une position réactionnaire, adulant un passé idéalisé ou l’exotisme contemporain de toute société qui semblerait plus proche de la nature où la communauté