la promenade
Les parents posèrent leurs outils contre le mur et, poussant la porte, s’arrêtèrent au seuil de la cuisine. Assises l’une à cote de l’autre, en face de leurs cahiers de bouillon, Delphine et Marinette leur tournaient le dos… « Alors ? demandèrent les parents. Il est fait, ce problème ? »
Les petites baissèrent la tête « Pas encore, répondit Delphine avec une pauvre voix, il est difficile. La maitresse nous avait prévenues. »
« Du moment que la maitresse vous l’a ordonne, c’est que vous pouvez le faire. Mais avec vous, c’est toujours la même chose. Pour s’amuser, jamais en retard, mais pour travailler, plus personne !
Eh bien! Vous cherchez encore. Vous y passerez votre samedi après-midi, mais il faut que le problème soit fait ce soir. Et si jamais il n’est pas fait, ah ! S’il n’est pas fait ! Tenez, j’aime autant ne pas penser à ce qui pourrait vous arriver. »
Les parents étaient si en colère à l’idée que le problème pourrait n’être pas fait le soir, qu’ils s’avancèrent de trois pas à l’intérieur de la cuisine. Se trouvant ainsi derrière le dos des petites, ils tendirent le cou par-dessus leurs têtes et, tout d’abord, restèrent muets d’indignation. Delphine et Marinette avaient dessiné, l’une un pantin qui tenait toute une page de son cahier de brouillon, l’autre une maison et, à cote, un feu de bois dont les flammes léchaient une chaudière ventrue. Plus loin, on voyait un marigot où buvaient un bœuf et une très longue route.
Marcel Ayme