Cas clinique
Auteur : Jean-Pierre BÈGUE, Psychanalyste
« J’ai toujours peur que mon fils prenne froid et qu’il tousse »
Poussée par son mari qui menace de divorcer, Marie, une jeune femme d’une quarantaine d’années, s’est décidée à entreprendre une psychanalyse pour se débarrasser de l’obsession qui lui gâche la vie et celle de sa famille. Les séances qui vont suivre, choisies pour leur intérêt clinique, montrent que l’obsession de Marie a un sens mais que ce sens lui est difficilement accessible dans la mesure où le symptôme obsessionnel dont elle souffre a pour fonction de lui éviter la reconnaissance et la confrontation avec des sentiments inconscients inadmissibles pour sa conscience morale.
Lors de notre premier entretien, Marie m’explique longuement ce qu’elle ressent. Elle a toujours peur qu’il arrive quelque chose à son fils mais surtout qu’il prenne froid et tousse. Comme elle redoute en permanence une atteinte de ses poumons, elle met tout en œuvre pour lui éviter de prendre froid. Le matin, dès qu’elle se lève, elle regarde la température extérieure et la vérifie plusieurs fois pour ne pas se tromper ; la veille elle regarde les prévisions météo à la télévision pour connaître l’évolution de la température au cours de la journée du lendemain. Elle impose à son fils de prendre un pull supplémentaire dans son sac au cas où la température viendrait à chuter ; il sait que s’il avait froid, il doit impérativement l’appeler sur son portable. Par ailleurs elle lui demande sans arrêt s’il n’a pas froid ; si la fenêtre est entrebâillée elle lui demande s’il ne sent pas l’air sur lui. La nuit elle se réveille plusieurs fois pour écouter s’il ne tousse pas, il lui arrive même de se lever pour aller vérifier qu’il n’est pas découvert dans son lit. Quand la famille séjourne à la montagne dans sa maison l’été, elle est toujours aussi inquiète et elle ne parvient pas à se détendre même quand il fait beau et chaud, elle pense aux écarts de température importants