Écriture célinienne
Un manuscrit est à la fois le terrain de l'aventure littéraire et la conquête de l'espace qu'il s'est ouvert.
Le remplir, oui, mais de quelle manière. C'est là qu'intervient le style. L'écriture est le vêtement du style, sa parure.
D'où l'intérêt justement porté aux manuscrits des écrivains et l'assurance des aveux qu'ils nous abandonnent. On se penche sur l'intimité de la création, on peut y lire la joie (dans l'assurance, l'avancée rapide des idées, de leur formulation), ou au contraire, la souffrance (les manuscrits de Flaubert).
On le suit quand il musarde (les dessins en marge du texte), on y sent frémir les pulsions de l'inspiration, l'apaisement dans la régularité d'une graphie qui a trouvé son rythme, comme un corps qui marche à la mesure de ses possibilités physiques et "va à son pas",
Un manuscrit n 'est pas que le portrait de l'auteur (une simple lettre l'est). C'est plus que cela, l'entrée au plus intime de sa pensée, de la manière de la faire fonctionner, d'y circuler, d'y extraire les pépites par quoi elle s'affirme, s'offre au regard des autres, des lecteurs.
Alors on peut s'interroger. Que penser du manuscrit du "Voyage au bout de la nuit". Louis Ferdinand Céline le protestataire est là si tranquille au départ de sa terrible aventure littéraire