L'ame et le corps
1. Après Platon, lire et comprendre les textes philosophiques tend à devenir de plus en plus difficile, car il faut connaître l'histoire de la philosophie. Montrez en quoi la chose se vérifie avec cette conférence de Bergson.
i) Il y a d'abord des références à des auteurs du passé : Platon (§ 6), Descartes, Spinoza, Leibniz (§ 8),
Lamettrie, Helvétius, Bonnet, Cabanis (ibid.), Pascal (§ 20). ii) Il y a ensuite l'usage d'un vocabulaire spécifique légué par la tradition : âme, esprit, conscience, moi (§1 et
2)… essence (§ 1)… métaphysique, métaphysicien, cartésianisme, parallélisme (§ 8)… réalisme, idéalisme (§ 14)…
À noter aussi (mais vous ne pouviez guère le remarquer, et pour cause) : iii) La présence d'emprunts non signalés comme tels. Ainsi § 20 : « tout se passe comme si le corps était utilisé par l'esprit ». C'est ni plus ni moins la thèse du philosophe chrétien Saint Augustin (4e siècle). iv) La présence d'allusions pour initiés. § 20 : « La première méthode [celle du raisonnement pur en philosophie] (…) nous condamne à rester toujours dans le simple probable ou plutôt dans le pur possible, car il est rare qu'elle ne puisse pas servir à démontrer indifféremment deux thèses opposées, également cohérentes, également plausibles. » Allusion ici, au phénomène que Kant appelle « les antinomies de la raison pure », c'est-à-dire aux inévitables contradictions dans lesquelles tombe la raison pure (= coupée de l'expérience) quand elle cherche à trancher certains problèmes métaphysiques (le monde a-t-il/n'a-t-il pas commencé ? Y a-t-il/n'y a-t-il pas dans le monde des événements produits par liberté ?, etc.).
Remarquons, pour finir, que Bergson n'abuse quand même pas des références aux auteurs du passé non plus que du vocabulaire technique de la philosophie (sa conférence s'adresse à des non-spécialistes, c'est de la vulgarisation). La difficulté du texte tient aussi aux connaissances