Voilà déjà quinze ou vingt ans que j’ai traversé dans mon parcours de lectrice (lunaire à ce moment) une grande période Marguerite Duras. Aussi, l’occasion de l’auteure du mois de Lecture/Ecriture m’a permis de procéder à un peu de rangement dans mon grenier avant de retrouver le carton «béni» de ses livres volontairement remisés. D’aucuns pourraient peut-être s’étonner que je puisse reléguer des livres au fin fond d’un débarras alors que l’éthique livresque les voudrait parfaitement alignés sur de belles étagères. Alors là, il faut que j’avoue qu’après un grand amour avec l’auteure, certes il y a longtemps, nous nous sommes quittées à l’époque en d’assez mauvais termes (enfin, c’est surtout moi qui ai rompu avec cet amour bien trop déstabilisant). Plus question donc qu’un de ces ouvrages vienne me narguer du haut de certains rayonnages et là j’ai usé (ou abusé) du pire pouvoir du lecteur envers des livres : les cantonner dans un cagibi… Aussi, afin de bien asseoir ma réaction de l’époque, j’ai sorti en priorité «Moderato cantabile» qui, d’après mes souvenirs, est le plus susceptible de caractériser au mieux le contexte qui m’a petit à petit menée vers cette cassure. Autant l’histoire proprement dite est assez simple à relater car l’intrigue tient à peu de chose, autant aborder son impact allusif relève davantage de l’analyse, psychologiquement parlant. Alors commençons par l’histoire : Anne Desbarèdes, dans sa vie bourgeoise sans doute trop bien organisée, emmène son fils à sa leçon de piano du vendredi dans un appartement du port. Alors qu’elle attend avec lassitude que se termine cette séance musicale, elle assiste d’un peu loin, à l’assassinat d’une jeune femme par son amant dans un café voisin. Dès lors, dans son existence saturée d’ennui, Anne va se laisser envahir par une forme de fascination plus ou moins morbide autour de ce drame passionnel. Jour après