Socrate
Deux phrases permettent de découper le texte en trois parties d'inégale longueur. Pendant tout le début du texte, Socrate nie être coupable des accusations portées contre lui. En 35e, cependant, il fait tout à coup mention d'un "jugement" que les Athéniens viennent de rendre ; à partir de ce moment, il tient sa condamnation pour acquise et plaide, cette fois, non plus pour prouver son innocence, mais pour une peine alternative à la sentence de mort réclamée par les accusateurs. En 38c, enfin, nouveau changement de thème : "Pour n'avoir pas eu la patience d'attendre un peu [...] vous avez fait mourir Socrate." L'accusé porte un ultime regard sur le procès qui vient de s'achever et en tire les leçons.
On comprend que, dans un premier affrontement, l'accusation et la défense visent à déterminer la culpabilité ou l'innocence du prévenu (comme aujourd'hui en France, l'accusation parle d'abord, puis la défense) ; les juges se prononcent une première fois à ce stade ; l'accusé reconnu coupable, un second affrontement cherche à déterminer la peine applicable : à la sentence réclamée par l'accusation, le prévenu répond par une sentence alternative. Une nouvelle fois, les juges se prononcent. A tous points de vue juridiques, la procédure pénale proprement dite s'interrompt à la fin de la page 38b, après ce second vote des juges : les derniers mots de Socrate se présentent comme une péroraison extrajudiciaire.
Cette procédure athénienne diffère sensiblement de la procédure pénale applicable aujourd'hui en France ; aussi mérite-t-elle quelques précisions.
2) Le procès athénien (agôn) : quelques données juridiques
"Il n'aurait fallu que trois voix de plus pour que je fusse absous" déclare Socrate au moment où il apprend que les juges l'ont reconnu coupable (36a). Cette traduction paraît extrêmement contestable d'autant qu'elle porte sur un moment capital du procès : les traductions plus récentes (notamment celle de Luc Brisson, chez