Réécriture de deux scènes de la double inconstance, de marivaux
Arlequin, Flaminia
Arlequin. Mon amie, vous me gagnez le cœur. Conseillez-moi dans moi dans ma peine ; réfléchissons ; quelle est votre pensée ? Car je n’ai point d’esprit, moi, quand je suis fâché. Il faut que j’aime Silvia ; il faut que je vous garde. Me voilà bien embarrassé.
Flaminia. Et moi bien malheureuse ! Depuis que j’ai perdu mon amant, je n’ai eu de repos qu’en votre compagnie, je respire qu’avec vous ; vous lui ressemblez tant, que je crois quelquefois lui parler ; je n’ai vu dans le monde que vous et lui de si aimables.
Arlequin. Pauvre fille ! il est fâcheux que j’aime Silvia ; sans cela je vous donnerais de bon cœur la ressemblance de votre amant. Vous l’aimiez donc beaucoup ?
Flaminia. Regardez-vous, Arlequin ; voyez combien vous méritez d’être aimé, et vous verrez combien je l’aimais.
Arlequin. Je n’ai vu personne répondre si doucement que vous ; mais puisque vous aimiez tant ma copie, il faut bien croire que l’original mérite quelque chose.
Flaminia. Je crois que vous m’auriez encore plu d’avantage ; mais je n’aurais pas été assez belle pour vous.
Arlequin, avec feu. Par la sambille ! je vous trouve charmante avec cette pensée-là.
Flaminia. Vous me troublez, il faut que je vous quitte. Adieu, Arlequin ; je vous verrai toujours, si on me le permet ; je ne sais où j’en suis.
Arlequin. Je suis tout de même.
Flaminia s’en va.
Arlequin, seul. Ce pays-ci n’est pas digne d’avoir cette fille-là. Si par quelque malheur Silvia venait à disparaître, dans mon désespoir je crois que je me retirerais avec elle.
Acte II, scène 12
Silvia, Le Prince
Silvia est déjà sur scène, le Prince entre.
Silvia. Vous venez ; vous allez encore me dire que vous m’aimez, pour me mettre d’avantage en peine.
Le Prince. Belle Silvia, quand mon amour vous fatiguera, quand je vous déplairai moi-même, vous n’avez qu’à m’ordonner de me taire et de me retirer ; je me tairai, j’irai où vous voudrez, et je souffrirai sans me