Platon Phedon La Mort de Socrate
Socrate, condamné à mort injustement par le tribunal démocratique athénien pour impiété et pour avoir prétendument corrompu la jeunesse, est emprisonné dans une cellule : refusant les propositions d’évasion de ses disciples, Socrate attend patiemment le moment où il devra boire la ciguë, un poison violent ; ses principaux disciples (notamment Criton ; Platon, malade, n’était pas présent) assistent aux derniers moments du philosophe de l’Antiquité le plus fameux… C’est ce passage que nous relate Platon dans l’un de ses dialogues philosophiques les plus célèbres : le
Phédon.
LXV. — Quand il eut dit cela, il se leva et passa dans une autre pièce pour prendre son bain. Criton le suivit ; quant à nous, Socrate nous pria de l’attendre. Nous l’attendîmes donc, tantôt en nous entretenant de ce qu’il avait dit et le soumettant à un nouvel examen, tantôt en parlant du grand malheur qui nous frappait. Nous nous sentions véritablement privés d’un père et réduits à vivre désormais comme des orphelins.
Quand il eut pris son bain, on lui amena ses enfants — il avait deux fils encore petits et un grand — et ses parentes arrivèrent aussi. Il s’entretint avec elles en présence de Criton, leur fit ses recommandations, puis il dit aux femmes et à ses enfants de se retirer et luimême revint nous trouver.
Le soleil était près de son coucher ; car Socrate était resté longtemps à l’intérieur. Après cela l’entretien se borna à quelques paroles ; car le serviteur des Onze se présenta et s’approchant de lui : « Socrate, dit-il, je ne me plaindrai pas de toi comme des autres, qui se fâchent contre moi et me maudissent, quand, sur l’injonction des magistrats, je viens leur dire de boire le poison. Pour toi, j’ai eu mainte occasion, depuis que tu es ici, de reconnaître en toi l’homme le plus généreux, le plus doux et le meilleur qui soit jamais entré dans cette maison, et maintenant encore je suis sûr que tu n’es pas fâché