L’intolérance et la violence, voilà les gouffres où l’humanité menace de s’écrouler gouffres dans lesquelles elle est déjà tombée trop souvent. Ce n’est pas l’indifférence toute relative de l’accusé, ni son manque d’ambition, ni sa naïveté qui constituent une menace pour l’humanité, bien au contraire. Sa faiblesse, Messieurs les jurés, c’est sa force, ce qui fait que cet homme n’est pas un danger public, n’est pas une menace pour l’ordre social, ne peut en aucun cas être considéré comme une crapule. Rien dans son histoire personnelle, rien dans ces attitudes récentes ne le laisse supposer. Dans ce cas, Messieurs les jurés, être juste, c’est faire preuve de tolérance, c’est donner une chance à cet homme qui est notre semblable, qui aime comme il sait, et comme il peut, qui enfin dans un moment d’égarement, sous un soleil hallucinant, perd le contrôle de lui-même et commet l’irréparable. Etre juste, Messieurs les Jurés, c’est croire à son amendement, à son humanité, ce n’est pas le condamner d’emblée au nom de ce que l’accusation prétend être des valeurs et qui n’en sont pas. Combien de crimes a-t-on commis au nom de l’intolérance, au nom de la peur ou de la haine de la différence ? Etre justes, Messieurs les Jurés, c’est condamner cet homme pour un crime qu’il a certes commis, mais ce n’est pas le bannir définitivement de cette terre où il avait sa place, et où on l’a trouvé digne d’être aimé. Etre justes, Messieurs les jurés, c’est juger l’acte commis, ce n’est pas élever cet homme au rang de suppôt de Satan, au rang de grand prêtre d’une hérésie imaginaire pour attiser la haine de tous et mieux le condamner, dans un procès qui prend des allures d’une mascarade d’inquisition. Revenons dans notre pays, et quittons ces mœurs d’un autre âge. Cet homme, Messieurs les jurés, pour qui c’est le premier faux pas, ne mérite pas la mort, c’est évident. Il mérite le châtiment d’hommes responsables, c'est-à-dire confiants dans ce qu’il y a d’humanité dans chacun de nous, même