Philo
LE REFUS DU PSYCHOLOGISME
ALAIN MILON
PHILOSOPHIE
PÔLE MÉTIERS DU LIVRE
Cette réflexion sur les écritures de soi, leur nature, leur attrait et leur faiblesse s’inscrit dans une question plus générale sur l’hospitalité littéraire à travers la question du qui l’écrivain accueille-t-il dans son texte ? 1 Derrière cette question, c’est tout le problème de la finalité de l’acte d’écriture qui est posée. Il ne s’agit pas ici de cerner la figure de l’auteur mais beaucoup plus de l’interroger sous la catégorie de l’hospitalité littéraire, hospitalité dans l’écriture qui est tantôt un recueil de soi ou des autres, tantôt un écueil pour les autres que soi. Il ne s’agit pas non plus d’enfermer l’écriture de soi dans un modèle imposé par le diariste sous la forme du journal intime, de l’autofiction, de la confession, de l’autobiographie, de l’écriture épistolaire ou du carnet personnel... En réalité, il n’y a pas une écriture du soi au sens où toute écriture est en puissance écriture de soi, mais il y a une écriture de soi qui pose la question de la nature réelle de l’acte d’écriture, et une écriture de soi qui se complaît dans le récit de sa petite histoire personnelle, qu’il soit embarras affectif, émotif ou sexuel.
Contexte épistémologique
Notre intention n’est pas d’attribuer des bons points et dire ce que doit être la littérature, ou qui est ou n’est pas écrivain, mais plutôt de réfléchir sur le problème que pose l’écriture de soi, à savoir son refus de l’effet miroir, effet qui réduirait l’écrire à un se décrire ? Dans cette perspective, nous garderons en mémoire l’avertissement de Sartre dans Qu’est-ce que la littérature ? quand il montre qu’il n’y a rien de plus tragique que de projeter « ses émotions sur le papier ». Cet avertissement sera relayé par G. Deleuze quand il écrira que la littérature ne se résume pas à une petite affaire personnelle. Si le coeur brisé engendre souvent des embarras