Ce distingué amant, Hervé de son prénom, avait, entre autres passions, celle de la préparation de cocktails. Passion à laquelle il m'a d'abord initiée et que nous avons partagée par la suite. Il concoctait, je dégustais. N'allez pas croire que c'était seulement pour abuser de mon corps de déesse, puisque c'était parfois moi qui abusais de lui. Non, il me concoctait ses cocktails bienveillants parce qu'il appréciait ma conversation, mon gout pour les bonnes choses et mon sens de l'humour que l'effervescence et l'euphorie provoquées par les cocktails rendaient plus vif et décapant. Je le faisais beaucoup rire ; il faut dire que les spiritieux me rendent spirituelle, mais quand, en plus, on me sert des cocktails à base de champagne, je deviens alors légère comme une bulle. Mine de rien, c'etait mon intellectuel, mon Vévé, un intellectuel et un sacré bon vivant, une race de plus en plus rare. Il disait, tout en preparant ses cocktails: "L'art du barman s'apparente un peu à l'art de faire l'amour. Il faut faire preuve d'imagination, d'originalité et de gout." Dans les deux cas, cette expérience s'acquiert avec la pratique... ce qui fait que nous pratiquions souvent. Ce qui me plaisait chez lui, c'était son sens du professionnalisme amoureux, sa générosité et son gout de la fete. Toutes les occasions étaient bonnes pour célébrer: le lever du jour, le coucher du soleil, une bonne nouvelle, la pleine lune, une fleur nouvelle