Les villes invisibles
L’homme qui a voyagé au travers de chemins longs et tortueux, pendant un temps qui parut durer une vie, finit par apercevoir au loin, alors que l’aurore succède à l’aube, Mnémosyne, ville calme et reposante pour les uns, festive et trépidante pour d’autres. En réalité, tous ont visité ou visiteront un jour cette cité mais chacun gardera en mémoire, pendant l’espace d’un moment, une vision différente de cette fabuleuse mégapole.
Alors que le soleil se lève, le voyageur arrive enfin à l’entrée de la ville qui donne directement sur la partie basse de celle-ci. Il s’agit ici de la vieille ville avec ses rues pavées, ses maisons de briques rouges et leurs multitudes de cheminées, ses anciennes épiceries, d’où émane une agréable odeur de différents mets tout juste sortis du four que le commerçant nous invite à venir goûter ; le son d’une cloche qui résonne au loin signalant la rentrée des classes, les enfants qui restent émerveillés devant les vitrines des magasins de jouets au lieu d’aller en cours ; le facteur qui dévale la rue à vélo distribuant son journal et saluant les passants. Etrangement, mais sans savoir pourquoi, tous ces détails lui semblent familiers.
Le soleil est maintenant haut dans le ciel et le voyageur se trouve à présent dans la partie médiane de la ville. Assis sur la terrasse d’un café, il peut observer les nombreux travaux qui parsèment la route ici et là, les habitations qui s’élèvent sur plusieurs étages, pointillées en leur sommet d’antennes, un père de famille qui s’en va dîner avec sa femme et ses enfants avant de retourner au travail, les centres commerciaux qui brassent les foules continuellement. Le visiteur continue sa traversée qui lui semble jusqu’alors comme un air de déjà-vu.
La nuit est tombée sur Mnémosyne, c’est à ce moment-là que notre itinérant finit par découvrir la partie haute de la ville. Malgré l’absence de la lumière du jour, le voyageur est presque ébloui par ces gratte-ciel de