Les 30 glorieuses aux 30 piteuses.
Guy Caire
La période que nous considérons est riche en évènements . Lesquels retenir? Toute sélection est fonction de l'histoire qu'on entend retracer, chacune d'entre elles induisant des périodisations spécifiques. Ainsi une histoire diplomatique ne manquerait pas de retenir le 18 mars 1962 avec les accords d'Evian qui, mettant fin à la guerre d'Algérie, ferment la période des décolonisations. Pour une histoire politique le départ du général de
Gaulle le 28 avril 1969 marque la fin du gaullisme auquel la présidence de Pompidou ne saurait constituer tout au plus qu'un semblant de répit. Dans une histoire des moeurs c'est sous la présidence de Giscard d'Estaing, en
1975, que se situent les faits marquants, concernant les femmes ou les jeunes, avec la loi Weil sur l'interruption de grossesse et la majorité désormais fixée à 18 ans. Dans une histoire sociale on ne saurait oublier 1968 qui a vu se rencontrer un mouvement étudiant et une grève ouvrière de grande ampleur mais qui, au plan des idées, fait encore aujourd'hui l'objet d'un vif débat. Pour l'histoire du travail qui nous concerne nous proposons deux dates :1963 avec la grève des mineurs qui nous semble représenter l'un des soubresauts significatifs annonçant la fin d'un régime1 et 1983 avec le plan de rigueur qui consacre l'acceptation par la gauche des impératifs de la mondialisation des économies2. Ces deux dates balisent en définitive une histoire qui voit, avec le choc pétrolier de 1974 , la fin des " trente glorieuses"3 marquées par le plein emploi, l'augmentation de la richesse des ménages, la stabilité de l'univers du travail et l'entrée dans les " trente piteuses"4 où s'observent au contraire un chômage de masse croissant, une augmentation aléatoire du pouvoir d'achat, une incertitude sur la pérennité de l'emploi.
Pour explorer cette rupture nous opterons pour une démarche en trois temps . Adoptant tout