Lecture analytique phèdre, racine
Phèdre décrit ensuite ses efforts pour se guérir : fuite, éloignement, recours aux secours de la religion, mais ses efforts quoique sincères restent inefficaces. Ils lui accordent tout de même une rémission — que suivra la rechute, épouvantable :
« Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachées
C’est Vénus toute entière à sa proie attachée… »
Nous pourrions ajouter les assonances en "i" qui renforcent le rythme et évoquent peut-être la souffrance.
Cette passion est décrite en termes religieux alors même qu’il s’agit d’un amour contre-nature. Notons le champ lexical de la religion qui superpose l’amour pour Hyppolyte aux implorations adressées à Vénus pour y échapper : * Vers 285-286 : « J’adorais Hyppolyte » * Vers 288 : « J’offrais tout à ce Dieu que je n’osais nommer »
Cette idéalisation produit une scission dans le personnage :
« Quand ma bouche implorait le nom de la déesse,
J’adorais Hippolyte, et le voyant sans cesse »
On remarquera l’intensité dramatique que confèrent au dialogue la ponctuation riche et variée, les interjections (« Ô désespoir ! ô crime ! ô déplorable race !), les apostrophes (« Rivage malheureux »), la tendance au superlatif (« la plus misérable ») et à l’hyperbole (« le comble des horreurs »).
La vraisemblance de l’échange (le spectateur doit sentir la difficulté de l’aveu) est assurée par sa vivacité, proche de la stichomythie (dialogue dont chaque réplique ne contient qu’un vers). Dans les tragédies raciniennes, la parole a la valeur d’un acte : avouer un penchant coupable, c’est déjà commettre un crime, Phèdre veut y échapper par la mort (v. 4). À ce stade du dialogue, il reste peu de ressources à Phèdre pour retarder le moment de l’aveu : on constate, avec le chiasme lexical qui relie les vers 1-2 (« mortel » – « sang ») aux