Lecture analytique, le cid, acte i, scène 1
En janvier 1637, la pièce de Corneille, Le Cid, est jouée pour la première fois au théâtre du Marais. Elle connaît un succès extraordinaire au point d'être encore à l'affiche au mois de mars. Corneille s'inspire de l'œuvre de Guillén de Castro Las Mocedades del Cid parue en 1618. Rodrigo de Bivar est un personnage légendaire du XIes. Vassal du roi de Castille, Don Fernand, ses faits d'armes lui valent le surnom de Cid, seigneur en arabe. Le dramaturge s'intéresse avant tout aux amours contrariés des deux personnages principaux : Rodrigue le fils du noble don Diègue et Chimène la fille du Comte de Gormas. La scène d'exposition de la version définitive de 1682 se déroule à Séville, plus exactement dans les appartements de Chimène. L'intimité du lieu permet à la jeune femme de laisser libre cours à ses sentiments, elle se confie à sa gouvernante Elvire.
Le texte relève donc de la tragi-comédie ainsi dès la scène d'exposition Le Cid met en place l'opposition entre l'amour et l'honneur : les sentiments de Chimène entrent déjà en conflit avec les valeurs du Comte.
I les sentiments (ou le portrait) de Chimène
a) l'inquiétude de Chimène au service de la double énonciation La scène débute in media res, Elvire vient d'avoir un entretien avec le Comte. Chimène aime secrètement Rodrigue et désire connaître l'avis de son père sur ce dernier car il y a un autre prétendant, don Sanche. On comprend alors l'anxiété de l'héroïne. Les deux questions initiales, « Elvire, m'as-tu fait un rapport bien sincère? / Ne déguises-tu rien de ce qu'a dit mon père? » (v.1 et 2) appellent la répétition d'un propos déjà entendu. Ceci est confirmé par les vers 7, 9, 10 : « Dis-moi donc, je te prie, une seconde fois », « Apprends-moi de nouveau », « un si charmant discours ne se peut trop entendre ». Elvire affirme elle-même :« Et puisqu'il vous en faut encor