Le voile de draupadi - ananda devi
522 mots
3 pages
Le Voile de Draupadi est sans doute le plus "indien" des romans d'Ananda Devi. Peut-être aussi celui dont la facture est la plus classique : plus "figuratif" - en quelque sorte - que ne le seront les oeuvres suivantes, on y découvre des personnages biens campés dans leur psychologie, dans leur contexte familial et social, dans leur épaisseur ou leur évanescence physique... La trame narrative elle-même, sans être d'une linéarité chronologique continue et monotone, se laisse parcourir de façon fluide et saisissante. Ce parcours, s'il faut le qualifier d'un mot, est tragique. Du tragique il porte les signes du malheur, de la mort. Il porte les marques de ces émotions originelles que ne renieraient pas les antiques Grecs : la terreur et la pitié, celles que suscitent les actes extrêmes, les comportements destructeurs, les maux irrémédiables. Du tragique il possède surtout ce ressort implacable qu'est la fatalité, la terrible anankê. Quelle soit ici appelée destinée, qu'elle soit par un fil solide de tradition philosophique et religieuse rattachée au karma, lui donne une coloration sans doute plus hindoue, sans aucunement lui enlever sa portée universelle. Si l'on veut parler de l'histoire - il le faut certainement - on dira que c'est celle de ce couple indo-mauricien : Dev, jeune avocat ambitieux mais insignifiant, conformiste mais prêt à la corruption, mari raté, homme lâche sans doute. Anjali, héroïne et narratrice, mère torturée, femme aux forces infinies et aux fragilités de dérive inexorable. Leur tout jeune enfant est atteint d'une forme aiguë de méningite... la médecine lutte en vain, le couple se déchire près du lit de douleur. Espoir. Désespoir. Anjali accomplira-t-elle cette marche sur le feu vers laquelle la poussent son époux et sa belle famille, cet acte sacré et effrayant ? Cet abject marchandage avec les divinités illusoires, pour sauver la vie de l'enfant ? L'esprit d'Anjali et la matière du livre, pendant qu'avance la machine