La vie tranchée
Avec La vie tranchée, Bénédicte des Mazery nous offre un roman fort, poignant. C'est la grande boucherie de 14-18 rendue par un biais inattendu mais pas anodin. Un très bel hommage aussi pour tous ces poilus envoyés à l'abattoir.
En aout 1917, après trois années passées dans les tranchées, Louis, jeune vendéen de 23 ans, est amputé de quelques orteils. Vers la fin sa convalescence, il reçoit un courrier officiel. Il est déclaré inapte temporaire et est affecté comme lecteur dans une commission du contrôle postal aux Armées. Lui qui a subit la boue, les poux, le froid, l'horreur, le sang et les gaz, se retrouve dans un bureau à ouvrir plusieurs centaines de lettres par jour. Il y traque les propos antipatriotiques, les signes de fraternisation avec l'ennemi, le défaitisme, les critiques contre les supérieurs et le gouvernement, caviarde les idées pacifistes. Le Tigre, le grand Clémenceau n'a-t-il pas dit qu'il voulait la guerre jusqu'au bout. Mais à quel prix ?
La paix. Combien de jours, de semaines, de mois et d'années, Louis l'avait espérée, attendue ! Une paix victorieuse la plupart du temps mais, certains jours, même une paix blanche ou boiteuse aurait convenu pourvu qu'elle le sorte de cet enfer.
Le jeune homme va lire et devoir censurer toutes les lettres qui expriment la souffrance et la détresse des camarades restés au front. Il ne peut s'empêcher de penser à son camarade, son frère de tranchée, Fernand presque remis de ses blessures et dont le retour au front est inéluctable. Pour les poilus, Louis est devenu un « embusqué », un « planqué». Mais peut-on rester indifférent à ces cris de désespoir, ces coups de noir (cafards sans fond) de ces miséreux surtout quand on a été l'un des leurs ? La présence de Blanche, séduisante jeune femme venue le remplacer pour taper les rapports hebdomadaires, ne fera qu'accentuer le fossé qui sépare maintenant Louis d'une vie normale tant espérée. La vie peut-elle redevenir normale après ce qu'il a