La tentative de séduction du vieillard dans belle du seigneur
Il y a un fait qu’on ne peut nier à la lecture de Belle du Seigneur, Solal ressemble à Don Juan : chez les deux personnages la fidélité n’est pas leur qualité première et aucune femme ne leur résiste.
S’il peut avoir toutes les femmes, c’est Ariane qu'il veut séduire, la belle épouse du médiocre Adrien Deume. Et pour cela, il se livre à un jeu de mise en scène où il s’attribue paradoxalement le rôle d’un anti-Don Juan. Après avoir pénétré dans la villa des Deume, il se grime en vieux juif et observe la jeune femme convoitée en secret.
1) Ariane piégée par un voyeur qui a une longueur d’avance sur elle
Le roman s’ouvre par une scène de voyeurisme qui n’est pas sans évoquer celle, célèbre, de la Princesse de Clèves : « Arrivé devant la grande baie, il regarda, dissimulé par le lierre. Dans le salon de velours rouge et de bois dorée, elle jouait, assise devant le piano. » (BS p8). Comme le Duc de Nemours a dû faire le tour du jardin et franchir les palissades pour voir sa bien aimée vêtue légèrement, Solal doit grimper à un arbre et escalader le mur de la villa des Deume pour contempler Ariane dans son plus simple appareil, puisqu’elle prend son bain. Mais les deux héros triomphent de ces obstacles sans aucune difficulté .
Cohen mentionne à plusieurs reprises la position d’espion de Solal : « Des bruits de pas dans l’escalier, puis l’air de Chérubin. Voi che sapete che cosa è amor […] S’emparant de la valise, il s’élança, se dissimula derrière les lourds rideaux de velours » (BS p27), « De nouveau dissimulé derrière les rideaux, il l’admira lorsqu’elle apparut » (BS p34). Le motif du rideau initie la métaphore théâtrale. De plus, Solal décrit ainsi Ariane alors vue au Ritz: « Volontaire bannie comme moi, elle ne savait pas que derrière les rideaux je la regardais. » (BS p38), « dissimulé derrière les rideaux de sa chambre, je la regardais et la connaissais en ses folies » (BS p40). Même