La laïcité, le totem de la république ?
Une lecture approfondie de la loi de 1905 par Gilles J. GUGLIELMI
Professeur à l'université Paris-II (Panthéon-Assas)
C'est à une « approche sociétale » consacrée aux « contours de la laïcité », que nous invite le déroulement du « nouveau » colloque de Poissy de 2011. Approche sociétale pourrait plus précisément être traduit par « dimension complète : politique, juridique, sociale, et dont la représentation globale est collectivement perçue comme légitime ». Autant dire que l'objectif est bien de prendre du recul par rapport au coeur de la laïcité, sans pour autant perdre de vue dialogue et tolérance. Oui mais alors, pourquoi se pencher sur la laïcité, en procédant à une lecture approfondie de la loi de 1905 comme totem de la République ?
Une raison circonstancielle tout d'abord : le sujet devait être traité par Emile POULAT, auquel on doit sans doute son libellé, et que j'ai été appelé à remplacer tardivement avec beaucoup d'humilité et de déférence, tant ses travaux et la force de sa pensée font autorité. C'est en partant des résultats incontestables de ses recherches (notamment, son ouvrage précisément consacré à la question :
Scruter la loi de 1905, Fayard, 2010) et en pensant à ce qu'il aurait pu nous dire que j'ai cherché à écrire les répliques d'une sorte de dialogue imaginaire... Je le ferai en juriste et non en sociologue ou en politiste, mais en ayant bien sûr recours à l'Histoire.
Une raison de fond ensuite : la loi de 1905 est en effet un texte emblématique, bien qu'elle soit à la vérité très technique (au plan juridique) et que la plupart des représentations auxquelles elle donne lieu aillent bien au-delà de son contenu et de ses effets juridiques réels. Elle concentre sur elle tant les regards des partisans de la laïcité la plus stricte que ceux de la plus grande liberté d'action des religions et renvoie à la plus forte des luttes d'influence institutionnelle que la Troisième République