La figure du diable dans Baudouin de Flandres
« Comment Baudouin, le comte de Flandre, quitta Paris et s’en alla à Noyon, où il épousa le diable. »
Baudouin de Flandre est un roman en prose rédigé au milieu du XVème par une main anonyme. La source en vers (composée d’alexandrins monorimes), dont ne sont conservés que deux fragments, écrite en dialecte picard, remonterait au début du XIVe siècle. « [H]éritier de la chanson de geste, du roman et de la chronique, » ce roman, favorable à la croisade, « fourmill[e] d’aventures [et] de légendes » et est, à bien des égards, « un voyage au cœur même du Moyen Âge, de ce Moyen Age finissant qui cherche à se comprendre, voire à se défendre en sondant sa propre histoire1 ». C’est un extrait de ce texte traduit en français moderne qui sera l’objet de ce commentaire.
La narration, à trame linéaire, est fondée sur la chronologie des rois de France, de 1180 à 1292. Trois récits se détachent de l'ensemble : les aventures de Baudouin, de Ferrant et de Jean Tristan ; il s'agit alors d'une suite d'événements autour d'un seul personnage, le héros éponyme de l’œuvre, au cœur de l'intrigue. L’extrait qui nous intéresse se situe au début de ce récit, dans le premier triptyque. Il s’agit de la première partie du chapitre intitulé « Comment Baudouin, le comte de Flandre, quitta Paris et s’en alla à Noyon, où il épousa le diable » qui révèle l’origine de la malédiction du lignage flamand. En effet, cet épisode rapporte que Baudouin, ayant dédaigné le mariage prestigieux qui lui avait été proposé avec la fille du roi de France Philippe Auguste, parce qu’il avait décidé de ne pas s’unir à moins riche que lui, « épousera, sur un coup de tête, une princesse orientale inconnue, rencontrée dans la solitude d’une forêt et qui se révèlera être le diable, entré dans le cadavre d’une sarrasine défunte.2 » Un couple satanique qui engendrera un lignage satanique, cause plus loin dans le roman, de guerres et de meurtres… Ce chapitre se découpe en