Hegel l'esthétique
« Les choses de la nature se contentent d’être, elles sont immédiatement et d’une seule façon ; mais l’homme, en tant que conscience se dédouble : il est une fois, mais il est aussi pour lui-même. Il se contemple, se représente à lui-même, se pense et n’est esprit que par cette activité qui constitue un être pour soi. Cette conscience de soi, l’homme l’acquiert de
5 deux manières : primo, théoriquement, en prenant conscience de ce qu’il est intérieurement, de tous les mouvements de son âme, de toutes les nuances de sentiments ; en cherchant à se représenter à lui-même tel qu’il se découvre par la pensée ; enfin, en cherchant à se reconnaître aussi bien dans ce qu’il tire de son propre fonds que dans les données qu’il reçoit de l’extérieur.
10 Deuxièmement, l’homme se constitue pour soi par ses rapports pratiques avec le monde extérieur, et de ces rapports naît également le besoin de transformer ce monde, comme lui-même, dans la mesure où il en fait partie, en changeant les choses extérieures qu’il marque du sceau de son intériorité. L’homme agit ainsi, de par la liberté du sujet, pour ôter au monde extérieur son caractère farouchement étranger et pour ne jouir des
15 choses que parce qu’il y retrouve une forme extérieure de sa propre réalité. On saisit déjà cette tendance dans les premières impulsions de l’enfant : il veut voir des choses dont il soit lui-même l’auteur, et s’il lance des pierres dans l’eau, c’est pour voir ces cercles qui se forment et qui sont son oeuvre dans laquelle il retrouve comme un reflet de lui-même. Ceci s’observe [...] jusqu’à cette sorte de reproduction de soi qu’est une oeuvre