From justeen with love
Il y a beau avoir de nombreux kiosques, aucun n’avait du papier à lettres, par conséquent j’ai dû rabattre mon choix sur cette carte postale. Ce qui signifie un message plus court que je ne l’aurais souhaité. La neige, voilà ce que j’espérais voir de plus près, et pour l’instant la vitre du train dans lequel je suis ne me révèle rien d’autre que des traces de mains laissées par des enfants trop curieux. Tu m’avais dit de tout t’écrire, cependant dois-je aussi parler de mon voisin, un homme barbu qui se sert de sa chapka pour s’endormir et ronfler au point de couvrir le bruit de cadence des roues sur les rails ? Je pense que tu réalises à quel point il est douloureux de partir et de devoir abandonner l’endroit que j’apprécie énormément. Surtout que celui ou je vais est bien différent. Difficile aussi de se dire que les prochains mots que je devrai prononcer ne seront plus ceux de ton cher frère, que j’embrasse au passage, mais « Chouba » et « Chapka ». Adieu, le style victorien (ne frôle pas la crise en voyant ceci, tout de même) et bonjour les vêtements qui peuvent remplacer une couette. Adieu, aussi le charme de Paris, avec nos ballades nocturnes qui me manques terriblement. Peut-être suis-je un peu trop pessimiste ? Après tout, les Russes sont considérés comme chaleureux (pour l’instant mon voisin m’a tout l’air d’un ours en hibernation). En tout cas je l’espère fortement. Avant, que mon stylo n’écrive la suite sur la table du Transsibérien, comment se porte ce cher Kyuhna ? Je t’embrasse.
From Justeen with love, en direct du