Essai sur l'origine des langues, rousseau
Ce texte est extrait de l'Essai sur l'origine des langues de Rousseau, philosophe français du XVIIIème siècle. L'auteur y traite la question de l'origine du langage et de ses différences selon les zones du globe. Cet essai s'inscrit dans la lignée d'une réflexion collective qui place le langage au premier rang des grands thèmes philosophiques du XVIIIème siècle. Dans le passage suivant, le philosophe s'interroge sur ce qui a poussé les hommes à inventer le langage. Sa thèse est que le langage trouve son origine dans les passions et non dans les besoins. Il défend cette idée en affirmant que les besoins ont écarté les hommes, puis en expliquant que le langage a servi à exprimer les passions. Il déclare enfin que cette origine passionnelle a donné aux premières langues leur caractère mélodieux et passionné.
D'emblée, Rousseau affirme que l'homme a senti avant de raisonner. Il soutient donc que l'homme s'est senti primitivement, sans prendre de distance par rapport à lui-même, sans conscience de soi, et s'est contenté de sentir également les objets et êtres l'entourant, avant d'avoir conscience de soi et de pouvoir par là avoir conscience des autres. C'est avec la conscience de soi que vient la conscience de l'univers, et c'est cette faculté de se distinguer en tant qu'être différent et détaché du reste de l'univers que vient la capacité de raisonner. L'homme dans l'état hypothétique de nature, c'est-à-dire un état où sont retirés à l'homme la société et tout ce qu'elle a induit en lui (tels les besoins factices), n'a pas de conscience de soi et ne peut donc encore raisonner. Il dénonce l'erreur de la pensée empiriste dans la phrase : « On prétend que les hommes inventèrent la parole pour exprimer leurs besoins » et s'y oppose. En effet, pour les empiristes modernes du XVIIIème siècle, le sensible est à l'origine des idées. Si donc l'homme ressent une douleur à cause d'un manque -le sensible-, il