Enjeu du carbone
Quel beau film et rare que Le Paysagiste! La technique de l’écran à épingle confère une aura à la fois exotique, mélancolique et surréelle aux images de rêve créées par Drouin. Dès le début, nous sommes envoutés par une paire d’yeux qui nous observent, énigmatiques. Des visions intérieures nous sont bientôt révélées : sur l’image, au-dessus des yeux, un paysage s’ébauche et se métamorphose – un « paysage de l’esprit » d’une beauté calme où règne une paix pastorale. Tout en rondeur, des arbres et des collines se prélassent au soleil d’été, pendant que les ombres projetées par des nuages mouvants, des oiseaux et un petit avion survolent les champs labourés. Un piano et des violons jaillissent paresseusement sur la bande sonore, répétant doucement un thème hypnotique. Un artiste (Drouin, peut-être) peint une scène idyllique sur la toile; lorsque celle-ci est achevée, elle rayonne de lumière et invite le peintre à s’insinuer dans l’œuvre. L’artiste se glisse dans la toile qui se fond dans la campagne environnante. L’ambiance se transforme, les instruments à cordes passent à un ton mineur, ralentissant le rythme, auguraux. Nous sommes plongés dans un paysage étrange qui se distord sensuellement pour prendre la forme d’une rivière puis d’une autoroute. Avec l’artiste, nous nous aventurons sur ces routes à travers le temps et l’espace, vers un lointain souvenir. Les routes deviennent les veines d’une feuille. Nous sommes dans une jungle de grandes feuilles; nous sommes égarés, mais bientôt de retour sur la route. Les arbres se ploient et se confondent à une petite maison dans une rue de maisons semblables. Il fait maintenant nuit. L’artiste, illuminé par un réverbère solitaire, hésite à franchir le seuil d’une porte qui s’ouvre à son approche. Nous nous franchissons la porte, puis un autre et une autre encore. Les pièces sont toutes vides, hormis la dernière. Contient-elle un petit coffre rempli de souvenirs? Ailes de papillons, photographies,