Ecriture de nouvelle: une nouvelle-instant.
Elle se tenait là, devant moi. Assise sur un morceau de carton, elle tentait vainement de vendre une sorte de journal aux passants qui ne daignaient même pas baisser la tête vers elle. Quant à moi, j’étais posté sur le trottoir d’en face et je la regardais fixement. Je ne pouvais détacher mon attention de la jeune fille. Quel âge pouvait-elle bien avoir ? Je n’en savais rien mais je ne lui donnais pas plus de 16 ans. Elle semblait si frêle et si fragile malgré son air dur, comme si elle avait vécu les pires épreuves que la vie puisse imposer. Ses cheveux d’un noir de jais ressortaient négligemment de son écharpe décousue et ses vêtements étaient troués, anciens et misérables. Elle avait le teint pâle, je pensais même qu’elle était malade. Qui était-elle ? Que lui était-il arrivé pour qu’elle tombe aussi bas à son âge ? De nombreuses questions naquirent dans mon esprit tandis que mon regard s’accentuait sur l’adolescente. Elle lui ressemblait tellement… Ilénana. Iléana était la seule femme qu’il m’avait été donné d’aimer. Elle m’avait marqué au fer rouge pour toujours et, qu’importe ce que je faisais, je ne pouvais m’empêcher d’avoir constamment une pensée pour elle.
Il y a 15 ans de cela, je tombais éperdument amoureux du bout de femme qu’elle était. Iléana travaillait en tant qu’actrice dans un minable petit théâtre de la ville, j’étais psychothérapeute et dès le premier regard, nous nous sommes aimés. Nous vivions heureux ensemble et nous n’avions besoin de personne ; elle me suffisait autant que je pensais lui suffire. Malheureusement, le bonheur ne nous était pas destiné. Par un matin d’été, le soleil tapait à la fenêtre de notre chambre. Réveillé par ses rayons aveuglants, j’ouvris difficilement les yeux pour découvrir la pire chose au monde pour moi : le vide. Iléana était partie, reprenant toutes ses affaires et sans laisser aucun mot d’explication. J’avais passé trois ans de ma vie à me lamenter sur mon sort ; je la