Dissertation sur le discours de la vérité
Mettre un mot pour un autre, c'est souvent opérer un change- ment épistémologique décisif (qui risque d'ailleurs de passer inaperçu). Mais il ne s'agit pas d'échapper aux automatismes du bon sens pour tomber dans les automatismes du langage critique, avec tous les mots qui ont trop fonctionné comme slogans ou mots d'ordre, tous les énoncés qui servent non à énoncer le réel mais à boucher les trous de la connaissance (c'est souvent la fonction des concepts à majuscule et des propositions qu'ils introduisent, et qui ne sont guère, bien souvent, que des professions de foi, auxquelles le croyant reconnaît le …afficher plus de contenu…
Le mot de classe ne sera jamais un mot neutre aussi longtemps qu'il y aura des classes : la question de l'existence ou de la non-existence des classes est un enjeu de lutte entre les classes. Le travail d'écriture qui est nécessaire pour parvenir à un usage rigoureux et contrôlé du langage ne conduit que rarement à ce que l'on appelle la clarté, c'est-à-dire le renforcement des évidences du bon sens ou des certitudes du fanatisme. A l'opposé d'une recherche littéraire, la recherche de la rigueur conduit presque toujours à sacrifier la belle formule, qui doit sa force et sa clarté au fait qu'elle simplifie ou falsifie, à une expression plus ingrate, plus lourde mais plus exacte, plus