cocteau
Dès le début du livre, l'élève Dargelos apparaît auréolé d'insolence et de beauté. C'est le «coq du collège». La métaphore n'est pas innocente. On y reconnaît l'étymologie consonantique que l'auteur lui-même attribuait à son nom: Coc-teau. C'est par lui que le scandale arrive. C'est lui qui se révolte contre l'ordre petit-bourgeois, qui déclenche la fatalité dont la boule de neige puis la boule d'opium sont l'emblème funeste. C'est lui encore qui annonce les jeux de l'amour et de la mort. Mais pour Élisabeth, Paul et bientôt Agathe, la vie elle-même est-elle autre chose qu'un jeu? Oisifs, vivant en marge des réalités quotidiennes, à l'abri des soucis matériels _ d'abord pauvres, ils sont entretenus par un médecin, un oncle lointain; puis le mariage d'Élisabeth les installe définitivement dans l'opulence _, ils ne se préoccupent que de leur «trésor». Constitué d'objets fétiches apparemment sans intérêt, celui-ci est à la fois le symbole de leur moi le plus secret et du territoire sacré autour duquel s'organise un autre univers, celui de l'imagination, de l'irréel, de la magie: sans qu'ils s'en doutent, la pièce (chambre ou espace scénique?) qu'ils occupaient «se balanc[e] au bord du mythe».
Plus proches du conte fantastique que du roman d'analyse, les Enfants terribles mettent donc en scène une sorte de quête mystérieuse où s'accumulent des épreuves destinées à écarter les profanes et à assurer la cohésion des fidèles. Le désordre, matériel et affectif, est érigé en règle absolue. Le vol est un rite initiatique parmi d'autres. La folie, sans laquelle il n'y a pas de féerie