Bovary sabrina
Peut-être inspiré par un souvenir personnel (Flaubert avait assisté le 18 juillet aux comices agricoles à Grand Couronne), le chapitre VIII constitue un moment essentiel dans le roman: en alternant le discours de Rodolphe à Emma avec celui du conseiller Lieuvain s’adressant à la foule, le romancier met en scène deux paroles trompeuses, dont il souligne la fausseté par une ironie manifeste. Pourtant, à la fin de la cérémonie, au moment où Rodolphe s’empare de la main de Madame Bovary, apparaît Catherine-Nicaise-Elisabeth Leroux, un personnage de servante, devant lequel Flaubert renonce à toute ironie, au profit d’une description extrêmement minutieuse. Dans quelle mesure nous propose-t-il ici une évocation réaliste, qui rend compte des oppositions sociales au XIX ème et de l’exploitation dont sont victimes certaines catégories de population?
Journal Le Nouvelliste de Rouen (Lauréats des Comices agricoles de 1852 à Grandcouronne)
I L’organisation de la description
La dramatisation de l’apparition de Catherine permet de mettre en valeur celle-ci: la multiplication de petites phrases courtes présentées au style direct crée un effet d’attente, et suscite la curiosité. La plupart de ces interventions sont anonymes, à l’exception du conseiller Lieuvain et de Tuvache, ie les autorités, le conseiller qui prononce le discours et le maire. L’utilisation de formules exclamatives manifeste l’impatience des spectateurs, impatience qui devient celle du lecteur.
La description elle-même est enclenchée par « Alors« , et l’emploi du passé simple qui suit « on vit » suggère véritablement « l’événement » en cours de réalisation.
Trois points de vue différents organisent cette description:
Flaubert choisit de recourir tout d’abord à une focalisation externe (Définition: le narrateur en sait moins que le personnage; il décrit exclusivement ce qu’il voit ou entend): « Alors on vit s’avancer« . Ici, on a le sentiment que c’est l’un des spectateurs qui