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COMMUNICATION DE PIERRE RUELLE
À LA SEANCE MENSUELLE DU 11 DÉCEMBRE 1982
’objet, la « matière » de la philologie n’est pas une réalité objective, limitée et organisée comme un cristal de quartz ou un animal déterminé ou inorganisée comme un sac de sable ou faiblement organisée comme un banc de poissons. Ce n’est pas non plus un être de raison comme le carré de l’hypoténuse ou un enchaînement d’êtres de raison comme la mathématique. On ne soulèvera sans doute pas d’objections si je dis, grosso modo, que la philologie étudie une expression élaborée de la pensée humaine et que cette expression est multiple et souvent complexe.
Les méthodes de la philologie ne sont pas moins complexes et multiples.
Cette complexité et cette multiplicité sont, nous le verrons, de nature à troubler le jugement et à faire croire qu’une méthode ou l’autre est la méthode par excellence.
Pis encore, elles peuvent pervertir les esprits au point que, les moyens étant confondus avec la fin, une méthode donnée sera considérée par d’aucuns comme l’essence même de la philologie.
Mais c’est assez parler comme la sibylle. Je voulais seulement vous persuader que la philologie, si la complexité de son objet et de ses méthodes est bien ce que j’ai dit, ne peut être qu’un concept empirique, variable dans le temps et, dans un même temps, le temps présent, variable d’un individu à l’autre, dans certaines limites. Reste à proposer une définition où la part de subjectivité soit aussi réduite que possible.
Plutôt que de rechercher, dans la littérature récente et spécialisée, un énoncé plus ou moins satisfaisant que j’aurais essayé de justifier ou de parfaire, il m’a semblé plus instructif et peut-être plus intéressant de partir de définitions banales.
L
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J’avais lu avec enthousiasme, peu après sa publication en 1933, la Défense de la philologie de Servais Étienne. Je viens de la relire, avec moins de plaisir, je l’avoue : je n’y ai plus