Anthologie revolte
Barbare
Bien après les jours et les saisons, et les êtres et les pays,
Le pavillon en viande saignante sur la soie des mers et des fleurs arctiques ; (elles n'existent pas.)
Remis des vieilles fanfares d'héroïsme - qui nous attaquent encore le cœur et la tête, - loin des anciens assassins -
Oh ! le pavillon en viande saignante sur la soie des mers et des fleurs arctiques ; (elles n'existent pas.)
Douceurs !
Les brasiers, pleuvant aux rafales de givre, - Douceurs ! - les feux à la pluie du vent de diamants jetée par le cœur terrestre éternellement carbonisé pour nous. - O monde ! -
(Loin de vieilles retraites et des vieilles flammes qu'on entend, qu'on sent,)
Les brasiers et les écumes. La musique, virement des gouffres et chocs des glaçons aux astres.
O douceurs, ô monde, ô musique ! Et là, les formes, les sueurs, les chevelures et les yeux, flottant. Et les larmes blanches, bouillantes, - ô douceurs ! - et la voix féminine arrivée au fond des volcans et des grottes arctiques...
Le pavillon...
Le dormeur du val
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Le Déserteur
Monsieur le Président je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers