Amphitryon molière acte ii scène première
ACTE II, SCÈNE PREMIÈRE , extrait
AMPHITRYON, SOSIE.
[...]
SOSIE Je ne l'ai pas cru moi, sans une peine extrême.
Je me suis, d'être deux, senti l'esprit blessé;
Et longtemps, d'imposteur, j'ai traité ce moi-même.
Mais à me reconnaître, enfin il m'a forcé:
J'ai vu que c'était moi, sans aucun stratagème.
Des pieds, jusqu'à la tête, il est comme moi fait;
Beau, l'air noble, bien pris, les manières charmantes: Enfin deux gouttes de lait
Ne sont pas plus ressemblantes;
Et n'était que ses mains sont un peu trop pesantes,
J'en serais fort satisfait. AMPHITRYON À quelle patience il faut que je m'exhorte!
Mais enfin, n'es-tu pas entré dans la maison? SOSIE Bon, entré! Hé de quelle sorte?
Ai-je voulu jamais entendre de raison?
Et ne me suis-je pas interdit notre porte? AMPHITRYON Comment donc? SOSIE Avec un bâton;
Dont mon dos sent encore une douleur très forte. AMPHITRYON On t'a battu? SOSIE Vraiment! AMPHITRYON Et qui? SOSIE Moi.
AMPHITRYON Toi, te battre? SOSIE Oui, moi; non pas le moi d'ici,
Mais le moi du logis, qui frappe comme quatre. AMPHITRYON Te confonde le Ciel, de me parler ainsi! SOSIE
Ce ne sont point des badinages.
Le moi que j'ai trouvé tantôt,
Sur le moi qui vous parle, a de grands avantages:
Il a le bras fort, le cœur haut;
J'en ai reçu des témoignages:
Et ce diable de moi m'a rossé comme il faut,
C'est un drôle qui fait des rages*. AMPHITRYON Achevons. As-tu vu ma femme? SOSIE Non. AMPHITRYON Pourquoi? SOSIE Par une raison assez forte. AMPHITRYON Qui t'a fait y manquer, maraud; explique-toi? SOSIE Faut-il le répéter vingt fois de même sorte?
Moi, vous dis-je; ce moi plus robuste que moi;
Ce moi, qui s'est de force emparé de la porte.
Ce moi, qui m'a fait filer doux:
Ce moi, qui le seul