À la mémoire de…
Dès le surlendemain des festivités, nous y étions déjà établis. Je rêvais naïvement à notre avenir ; je crus un instant vivre un bonheur absolu. Cependant, les jours se succédèrent, et je remarquai des changements étranges de comportement chez ma femme. Elle consacrait des journées entières à astiquer ou simplement à appéter la coutellerie que lui avait donnée sa mère. Maintes fois, j’eus l’impression de l’entendre converser avec ses objets de fer. Elle leur accordait un amour inconditionnel et inexplicable comparable à celui que partage une mère avec son nouveau-né. Inquiet, je contactai un docteur qui, après avoir minutieusement étudié son dossier médical, m’indiqua malheureusement qu’il s’agissait probablement de symptômes d’apparition de schizophrénie. Je n’osai en parler à ma femme, mais je me résolus par précaution à disposer de ses ustensiles sataniques. Un soir, pendant que mon épouse somnolait déjà depuis quelque temps, je me faufilai silencieusement dans la cuisine où résidait la cause de tous mes soucis. Je découvris par observation une même adresse gravée dans le manche de chaque coutelas.
Le lendemain, je me décidai à rendre à qui de droit appartenait ces tranchants maudits. Le vieil homme barbu qui vint me répondre me parut bien déconcerté, et déclara d’une voix morne, avant de