L'ingénue
Dans cette atmosphère de plomb, J'ai rendu mes habits de soldat, Pour ne plus être de ceux que l'on fond, Mais la pionnière d'un nouveau combat. Je me préfère pupilles légères, Que remous sur mer morte, Ranger mes sanglots sur l'étagère, Plutôt que m'y noyer à leur porte. Alors, j'ai troqué mes paupières, Et leur houle intérieure, Pour de valeureux yeux solitaires, Qui naviguent sans frayeurs. On ne me prend pas au sérieux, C'est moi l'ingénue à l'œil rose, Et dans mon immense shaker bleu, J'embellis les choses, les métamorphose. D'un homme banal, J'en fais George Clooney, J'sais que c'est pas normal, Mais le dernier était vraiment laid. Je suis une très bonne alchimiste, Et au noir et blanc du réel, Je préfère les lumières d'un solstice, Où se heurte gaiement mes prunelles. J'ai aussi un sacré laboratoire, Savamment aménagé, Où l'on troque sa mémoire, Pour de minis hommes en papiers. Dans mes tubes à essais, J'ai essayé plusieurs mélanges, Et même les buses les plus rusées, Avaient des allures d'ange. -
On ne me prend pas au sérieux, C'est moi l'ingénue à l'œil rose, Et dans mon immense shaker bleu, J'embellis les choses, les métamorphose. D'un homme banal, J'en fais George Clooney, J'sais que c'est pas normal, Mais le dernier était vraiment laid. Et si mon œil chutait, Laissant le torrent m'inonder, Je crois bien que je mourrais, Sous le poids de douleurs anciennes. Mais si, dégueulée par la mer, J'échouai par chance en d'autre lieux, Je ferai alors mes prières, Au nom des imbéciles heureux.