L'inconscient
A première vue, oui, évidemment : si on désire, n'est-ce pas pour atteindre le but, l'objet, le résultat ? Mais on peut remettre en cause cette idée naïve :
I. Il est absurde de désirer l'impossible car le but du désir est sa réalisation
Nous pensons naturellement que le désir vise un objet. Si c'est le cas, il est absurde de désirer l'impossible : c'est se condamner à l'échec et à la frustration.
Si on admet que le but du désir est d'être assouvi, alors il est clair que l'éthique commandera de n'avoir que des désirs réalistes. Ainsi Epicure recommande de faire le tri entre les désirs possibles et impossibles pour ne chercher à satisfaire que les premiers, et même, parmi ceux-ci, les plus simples, ceux qui sont naturels et nécessaires (boire, manger, dormir).
C'est de cette idée que découle l'éthique stoïcienne : distinguer ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas pour concentrer notre pensée sur ce qui est possible, ce qui est en notre pouvoir. Ainsi on se rend indépendant des contingences extérieures, et en plaçant le bonheur dans la vertu on est certain de l'atteindre...
L'idée sous-jacente est que le bonheur n'est pas de désirer, mais d'être satisfait. Car le désir est trouble, et le bonheur est dans le repos. Ainsi, pour les bouddhistes, le but de la vie est de cesser de désirer pour atteindre ce nirvana que les philosophes grecs appelaient ataraxie (absence de troubles).
II. Il n'est pas absurde de désirer l'impossible car le vrai but du désir, c'est le désir lui-même
Nous pouvons remettre en cause le présupposé de la partie précédente : le véritable but du désir n'est pas son objet (il n'est qu'un prétexte, un objectif superficiel), mais de continuer à désirer. Le désir est une fin en soi.
Désirer l'impossible peut nous tirer en avant. En visant l'impossible, on ira plus loin que si on se limite d'avance à ce qui nous paraît possible. « Das Ewigweibliche zieht uns hinan » (Goethe) (L'éternel féminin nous