L'avare
Chère mère, Je t'écris cette lettre pour te parler de mon nouveau voisin : Monsieur Pique-Lessous. Il est atteint, hélas, d'une terrible maladie qui le ronge de l'intérieur : l'avarice ! En le regardant vivre, cela me rappel le texte de Marivaux : « La femme avare et son mari ». Vêtu d'un pourpoint sombre, démodé et usé par l'âge, de vieilles chausses trouées et une fraise du même aspect, il me fait penser à Harpagon dans « l'Avare de Molière ». De petits yeux jaunes semblables aux fouines, scrutant le moindre geste dans sa demeure, et pouvant réduire au silence une foule en colère; des doigts crochus, un visage osseux et anguleux, un nez de vautour, des cheveux gris cendrés en broussailles, une démarche chaloupée; cette caricature annonce son caractère. Vieux, grincheux, il maltraite ses hommes à tout faire. Dommage que tu ne sois pas là pour le voir aboyer ses ordres : « Ne frottez pas trop fort les meubles de peur de les user ». Et lorsqu'il parle à son cuisinier : « Sachez, monsieur, qu'il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger »; ou alors : « Quand il y a à manger pour huit, il y en a bien assez pour dix ! ». Et lorsque ses deux valets se retrouvent seuls, ils ne pèsent pas leurs mots : « La peste soit de l'avarice et des avaricieux ! »; vocifère l'un d'eux. L'autre réplique immédiatement : « Ah ! Qu'un homme comme cela mériterait bien ce qu'il craint et que j'aurais de joie à le voler. Une jour, je lui renverrais la monnaie de sa pièce ! ». Effectivement, Pique-Lessous est, on peut l'avouer, cousu d'or. Il suffit de proférer les mots : gaspiller, dilapider, donner … qu'il en devient presque fou.. Après, je les entends se confesser à leurs amis, voilà ce que j'ai cru comprendre : « Pique-Lessous est de tous les humains, l'humain le moins humain, le mortel de tous les mortels le plus dur et le plus serré ! »; une autre personne affirme que : « dans une portée de louve, il se trouve y