L'amour et l'amour de soi
Et lorsque dans l'acte 3, scène 3, Célimène dit à Alceste : « Non, vous ne m'aimez point comme il faut que l'on aime », elle veut lui imposer sa propre façon d'aimer. Et il répond qu'il souhaiterait, que « le ciel en naissant ne vous eut donné rien, que vous n'eussiez ni rang ni naissance ni bien, et que j'eusse la joie et la gloire en ce jour de vous voir tenir tout des mains de mon amour. », étrange amour qui aboutit à la négation de l'être aimé, comble de l'égocentrisme, il veut qu'elle n'existe qu'à travers lui. Car Célimène a sa propre personnalité, son entourage, son argent, son libre arbitre, situation exceptionnelle à l'époque, Molière évoque ainsi, avant la lettre, un des problème fondamentaux des couples modernes, l'indépendance des femmes. Chacun des deux héros promène avec lui son univers, il les confronte à armes égales, et ces univers sont irréductibles l'un à l'autre. Et cette passion déraisonnable qu'Alceste tente de combattre, cette passion est parfois profondément touchante, lorsque par exemple Alceste le pure, l'intransigeant, l'ennemi fanatique du mensonge, supplie Célimène de lui mentir. Acte 4, scène 3 : « Efforcez-vous ici de paraître fidèle, et je m'efforcerai moi de vous croire telle ». A l'acte 5, il espère encore la changer, mais cet espoir est chimérique, on ne peut pas changer un être, et on n'a pas le droit d'exiger ce changement. A travers des excuses embarrassées et dans le langage précieux du 17eme siècle, c'est ce que célimène veut faire comprendre à Alceste, ce qu'elle veut lui dire c'est « Si tu m'aimes, accepte-moi comme je suis,