La fin du triple A a-t-elle aussi dégradé la politique ? La «lucide espérance» d’Aimé Césaire peut-elle suffire, servir de viatique et de vision ? A cent jours du premier tour, la campagne ne peut se résoudre à un choix entre une rigueur de gauche et une austérité de droite. Les caisses sont vides, la cause est entendue. Faut-il pour autant baisser les bras et, au nom du «réel» et de la «responsabilité», se refuser à faire bouger les choses ? L’historien de l’immigration Patrick Weil et quelques dizaines de spécialistes en ont décidé autrement. Ils lancent 80 propositions qui ne coûtent rien. Même si leur première qualité n’est pas leur gratuité. Dans tous les secteurs de la société et de l’économie, ces experts montrent qu’il est possible de prendre des décisions qui peuvent changer la vie quotidienne des Français, leur rapport à la citoyenneté ou le fonctionnement des institutions. Libération a expertisé ces contributions. Toutes ne sont pas nouvelles, mais nombre ont été à jamais différées par manque de courage politique, comme l’interdiction du cumul des mandats. Une simple réforme des contrôles d’identité dont sont systématiquement victimes les jeunes pourrait ainsi changer les rapports entre quartiers et police. Ainsi va ce catalogue, mélange ambitieux de mesures modestes ou fondamentales lorsqu’il s’agit de réformer la fiscalité des personnes et des sociétés. Preuve qu’il peut exister en France, malgré la crise, malgré les cadres européens, malgré les déficits, une politique de gauche et de progrès qui rende espoir et, soyons fou, fasse