une étude expérimentale sur le rôle de la peur dans le changement des attitudes néfastes
Didier Courbet1
Résumé
L’article dresse, tout d’abord, un état critique des recherches sur l’influence des campagnes de communication de santé publique qui tentent de modifier des attitudes néfastes pour la santé des individus en utilisant l’appel à la peur. Il explique, ensuite, une étude expérimentale sur le rôle de la peur ressentie après plusieurs expositions à un message. Les résultats montrent que le danger assez fortement représenté n’a été efficace sur l’intention d’arrêter de fumer qu’avec plusieurs répétitions du message. De façon surprenante, les récepteurs qui se sentent les plus vulnérables quant au fait d’avoir un cancer sont ceux qui n’ont pas l’intention d’arrêter de fumer. Les sujets qui se sentent les moins vulnérables ont une forte intention d’arrêter de fumer. Les résultats sont discutés dans le cadre de la théorie des traitements biaisés de l’information.
Dans le domaine de la santé, lorsque des ministères ou des organisations publiques souhaitent modifier des comportements ou des attitudes néfastes chez les citoyens, ils utilisent principalement deux grands types de moyens (RICE et ATKIN, 2001). Le premier consiste à agir sur l’environnement juridique, à modifier les lois et les réglementations. Lorsque l’attitude à l’égard d’un comportement donné est négative et que celui-ci est imposé par un règlement (obligation de mettre la ceinture de sécurité en voiture), les psychologues sociaux ont constaté que les individus modifiaient ensuite fréquemment leur attitude envers le comportement en question. Dans ce cas, et afin de lutter contre une dissonance cognitive (FESTINGER, 1957), les individus mettent, en effet, leurs connaissances, leurs représentations et leurs jugements en adéquation avec les comportements qui leur