Principe de l’équilibre – Le brigand et l’homme puissant qui promet à une communauté qu’il la protégera contre le brigand sont probablement tous deux des très semblables, avec cette seule différence que le second parvient à son avantage d’une autre façon que le premier, c’est-à-dire par des contributions régulières que la communauté lui paye et non plus par des rançons de guerre. (Le même rapport existe entre le marchand et le pirate qui peuvent être longtemps un seul et même personnage : dès que l’une des fonctions ne leur paraît pas prudente ils exercent l’autre. Au fond, maintenant encore la morale du marchand n’est qu’une morale de pirate, plus avisée : il s’agit d’acheter à un prix aussi bas que possible – de ne dé-penser au besoin que les frais d’entreprises – et de revendre aussi cher que possible). Le point essentiel c’est que cet homme puissant promet de faire équilibre au brigand ; les faibles voient en cela la possibilité de vivre. Car il faut ou bien qu’ils se groupent eux-mêmes en une puissance équivalente, ou bien qu’ils se soumettent à un homme qui soit à même de contrebalancer cette puissance (leur soumission consiste à rendre des services). On donne généralement l’avantage à ce procédé, parce qu’il fait en somme échec à deux êtres dangereux, le premier par le second et le second par le point de vue de l’avantage : car le protecteur gagne à bien traiter ceux qui lui sont assujettis, pour qu’ils puissent non seulement se nourrir eux-mêmes, mais encore nourrir leur dominateur. Il peut d’ailleurs qu’ils soient encore traités assez durement et assez cruellement : mais en comparaison de l’anéantissement complet qui jadis était toujours à craindre, les hommes éprouvent un grand soulagement. – La communauté est au début l’organisation des faibles pour faire équilibre aux puissances