Technique
1. La technique, la main et la pensée
Le mot "technique" est issu du grec "technè", qui désigne initialement tout savoir-faire permettant d'obtenir un résultat attendu. Englobant au départ la pratique artistique, ce savoir-faire vise plus précisément le production efficace de choses utiles pour l'homme.
C'est parce que l'homme est au départ le plus démuni des vivants, qu'il est amené à utiliser d'abord son corps ou des parties de ce dernier pour travailler. Dans le Protagoras de Platon, l'homme est qualifié de "nu, sans chaussures, ni couvertures ni armes", et c'est pour remédier à ce dénuement que Prométhée lui fait présent du feu et de la connaissance technique. Aristote objecte à ce mythe qu'en fait, l'homme est doté de la main, qui est "l'outil de loin le plus utile", parce qu'elle en remplace plusieurs; il considère de surcroît que cette polyvalence de la main va de pair avec l'intelligence.
L'outil inventé est d'abord un prolongement du corps et de l'énergie physique. Mais sa mise au point fait intervenir des capacités intellectuelles telles qu'on peut, selon André Leroi-Gourhan, considérer son usage comme le caractère distinctif de l'humanité : concevoir un outil, c'est anticiper sur son utilisation, mais aussi déterminer sa forme relativement à l'usage qu'on en attend ainsi qu'à l'énergie qu'on lui appliquera. S'il est vraisemblable, comme l'affirme Bergson, que l'homo faber a précédé l'homo sapiens, il n'en reste pas moins que le perfectionnement des outils suppose une capacité à penser et que très vite s'établissent des relations de complémentarité entre l'activité et la réflexion.
2. Technique et maîtrise de la nature
Si l'outil est la médiation entre l'homme et la nature, son usage peut constituer une grave agression à l'égard du milieu. Dans de nombreuses sociétés "primitives", la chasse doit ainsi être précédée de rituels cherchant à se concilier l'esprit des espèces animales dont on va tuer des représentants; et les