Société
« SOCIÉTÉ, s. f. (Morale.)
Les hommes sont faits pour vivre en société; si l'intention de Dieu eût été que chaque homme vécût seul et séparé des autres, il aurait donné à chacun d'eux des qualités propres et suffisantes pour ce genre de vie solitaire; s'il n'a pas suivi cette route, c'est apparemment parce qu'il a voulu que les liens du sang et de la naissance commençassent à former entre les hommes cette union plus étendue qu'il voulait établir entre eux; la plupart des facultés de l'homme, ses inclinations naturelles, sa faiblesse, ses besoins, sont autant de preuves certaines de cette intention du Créateur. Telle est en effet la nature et la constitution de l'homme, que hors de la société, il ne saurait ni conserver sa vie, ni développer et perfectionner ses facultés et ses talents, ni se procurer un vrai et solide bonheur. Que deviendrait, je vous prie, un enfant, si une main bienfaisante et secourable ne pourvoyait à ses besoins? Il faut qu'il périsse si personne ne prend soin de lui; et cet état de faiblesse et d'indigence, demande même des secours longtemps continués; suivez - le dans sa jeunesse, vous n'y trouverez que grossièreté, qu'ignorance, qu'idées confuses; vous ne verrez en lui, s'il est abandonné à lui même, qu'un animal sauvage, et peut - être féroce; ignorant toutes les commodités de la vie, plongé dans l'oisiveté, en proie à l'ennui et aux soucis dévorants. Parvient - on à la vieillesse, c'est un retour d'infirmités, qui nous rendent presque aussi dépendants des autres, que nous l'étions dans l'enfance imbécile; cette dépendance se fait encore plus sentir dans les accidents et dans les maladies; c'est ce que dépeignait fort bien Séneque : « D'où dépend notre sûreté, si ce n'est des services mutuels? il n'y a que ce commerce de bienfaits qui rende la vie commode, et qui nous mette en état de nous défendre contre les insultes et les évasions imprévues; quel serait le sort